dimanche 25 mai 2014

Rêver est le cousin saoul de la mort

Hier, c’était encore ma fête. Mathieu voulait rapporter des livres à la bibliothèque, et en passant devant les tables de vente de livres usagés, le premier qui me saute dans face (dans face!), c’est : How to Know the Insects : An illustrated key to the more common families of insects, with suggestions for collecting, mounting et studying them. By H. E. Jaques, Professor of Biology, Iowa Wesleyan College. MATHIEU! I want to know the insex! Mathieu m’a offert ce livre. La typographie est malade, les dessins sont émouvants, les pages sentent la cave chez mes grands-parents. Et ce livre date de 1941! Il est plus vieux que Po! Tutessitée j’étions. Sur le chemin du retour, Mathieu m’en lisait des extraits, Georges Brossard style.

J’aurais voulu arrêter tous les passants pour leur dire « ÉCOUTEZ MATHIEU QUI LIT MON LIVRE D’INSEX », j’aurais voulu texter ma mère mais elle sait pas comment prendre ses textos. Un monsieur promenait son golden retriever gériatrique. J’ai dit au chien « REGARDE MON BEAU LIVRE DE BEUBITTES! ». Le golden a fait pipi devant la cabine téléphone, sans perdre son sourire de golden. On a fait un détour par Hochelag pour aller cogner chez Frédéric Dumont. J’ai dit « FREDOUNE, SENS MES BEUBITTES », il a dit « ma baleine? », j’ai dit « oui? », il a dit « baleine à bosses? », j’ai dit « mais oui je t’aime, je suis ta baleine torche truie pour toujours », puis on est repartis. Pour prolonger le plaisir, j’ai proposé à Mathieu qu’on passe par le parc La Fontaine. Et c’est là qu’on a vu l’affaire la plus quioute du monde.

Des. Bébés. Canetons.

Des touptits bébés! On en a comptés huit, et ils étaient tous en mode chasse. Les petits canetons pataugeaient doucement non loin de papa et maman colvert, et ils marchaient sur l’eau. Plus quioutes que Jésus. Comment ils font? C’est simple : quand le petit caneton voit une mouche à sa portée, il appuie sur turbo, et il est comme propulsé au point de flotter au-dessus l’eau. Piou piou piou! Mathieu MATHIEU! Je sens que je pourrais pleurer de quioute!


J’ai fait un homme de moi, j’ai pas pleuré, pis on est rentrés au Manoir deluxe pour faire une sieste avant de partir à l’aube pour l’enterrement de mon oncle au village de mes parents. Avant que l’urne soit descendue sous terre, j’ai vu passer un canard dans le ciel au-dessus du lac qui fait face au cimetière. J’ai pas pleuré.




*Le titre est de Frédéric Dumont.

mardi 13 mai 2014

C'est plus facile quand c'est de la fiction

Hier, j’ai rêvé que Vickie était vivante. Mais sa vie, sa maladie, c’était de la fiction. Elle était malade, on connaissait l’issue, mais c’était pas grave parce que c’était de la fiction. Elle allait vivre en appartement pour les dernières semaines qu’il lui restait. Mon rôle, c’était d’aller la voir pour m’assurer qu’elle va bien et m’occuper d’elle.

La veille, j’étais allée au Bistro de Paris pour la septième édition des Bistro ouvert, où on rendait hommage à Vickie. Le 11 mai 2014, tsé. Bring your own tutu.


Carl nous a lu sa biographie de Vickie en portant les lunettes de Lolita de Martine. [< + 3 + _ + < + 3 : essaie ça sur Facebook.] J’ai entendu des textes touchants, drôles, forts, on a frôlé l’émeute, on s’est énervé avec les grosses mains en mousse, Larue a porté ma barrette en pixels, ça sentait le pot, pis j’ai pris des photos de ma belle-soeur qui porte les lunettes de son frère.

Un manné, un gars assis au comptoir m’a dit « heille, si tu me donnes une cigarette, je vais lire sur scène ». Han, c’est Nick! C’est plate que je fume pas. « Bin, si tu me donnes 400 $, je vais lire. » OK! (C’est plate que j’aie pas 400 $.) J’avais même pas remarqué sa présence. Faut dire que je l’avais vu juste une fois avant ça. Il était camouflé sur le comptoir en train de boire sa quatrième pinte, caché en tsour de sa casquette verte sur laquelle il avait pinné un macaron de Volière. Ça fittait avec mes cheveux, aon. Fredoune, lui, était venu en kangourou. Des fois, il sortait du marsupium pour dire quelques mots, pis il retournait se cacher comme un ossetie. Nick me fait tellement penser à Fredoune — c’est deux osseties. Je lui ai dit qu’ils sont des jumeaux cosmiques. Fredoune a approuvé, pis il a filé dans sa poche. Nick était pas mal saoul. Calinours exalté. Il arrêtait pas de dire à Mathieu et moi qu’il nous aimait, il arrêtait pas de dire qu’il veut lire mais qu’il peut pas, il arrêtait pas de me dire que j’étais belle, et il a passé le reste de la soirée à s’excuser pour rien. 


Le lendemain matin, j’ai reçu un message de Nick. Il se rappelait pas de la soirée, et il s’excusait. Crisse d’ossetie. Après, j’ai rêvé à Vickou.

mardi 6 mai 2014

Bye, Mia

Je dois faire mes adieux à Mia. Dans une semaine, elle va partir vivre dans le futur appart de la future ex-coloc de Mathieu. Mia va disparaître de ma vie. Comme plein d’autres personnes.

Des fois, Mia vient se coucher dans le creux de mon bras, puis elle se revire subitement sur le dos en plongeant tête première. Quand elle fait ça, elle a l’air d’un lapin mort. Mais sa spécialité, c’est de se coucher pour former une sphère presque parfaite. J’aime quand Mia vient se déposer en boule sur moi. J’aime aussi quand Mia vient se coucher près de ma face en ronronnant de son plus fort, ou quand elle se couche en banane en étirant ses pattes antérieures démesurément, et je capote un peu (pas mal) sur ses petites poches sous les yeux qui lui donnent un air de lendemain de veille mais en genre super charmant comme c’est pas possible. Mais j’aime par-dessus tout le sourire de Mia. Chat manga.






Quand je suis allée en Gaspésie cet hiver, je me suis fait un amoureux. Mais il est mort avant la fin de mon voyage. Il était très malade. Son vétérinaire l’a euthanasié. Tout le monde meurt. Certains ont la fâcheuse tendance à disparaître prématurément. 

Ce matin, j’ai rêvé que je partageais un muffin aux fraises avec mon best friend forever. Il avait accepté de me revoir, et ce délicieux muffin rose ultrapoffé scellait notre amitié réparée. En dehors de ma vie rêvée, il ne veut plus me voir. Mon BFF est mort prématurément. 

Dimanche, ça fera un an que Vickie est morte. Elle me manque terriblement, et je ne sais pas quoi dire d’autre.


Ma Po, ma vieille picouille, elle est toujours là. J’étais presque certaine qu’elle n’atteindra pas son 19e anniversaire, j’avais même peur qu’elle ne voie pas le printemps. Mais je l’ai fait réparer. Po remise à neuf. Elle est là, au moment où je tape ces mots, fusionnée à moi. Je me prépare à sa mort avec beaucoup moins d’appréhension qu’avant, et quand elle va mourir, je vais avoir une peine immense, mais je serai ni fâchée ni déçue. De tous les gens que j’ai croisés dans ma vie, seuls les humains ont pu me décevoir.